1.UNE DEMANDE
ALIMENTAIRE MONDIALE IMPORTANTE, A SATISFAIRE D’ICI 2050
L’origine des
réflexions du groupe de travail
« Prospectives »
d’Interactif fait suite aux interrogations sur la place de
l’Agriculture
Française et sa capacité à nourrir les 1.7
milliards d’habitants
supplémentaires qui peupleront la planète à
l’horizon 2050.
Ce travail a
consisté à recenser et à analyser les
études débouchant sur
divers scénarios, réalisées par les grands
organismes internationaux. Des
synthèses ont également été
effectuées par des organismes français comme le
Centre d’Etude et de Prospective du Ministère de l’Agriculture
ou très
récemment par l’Académie des Sciences.
De cette
bibliographie, nous avons retenu un scénario tendanciel (par
opposition aux scénarios de rupture) qui nous paraît le
plus adapté à ce que
sera l’agriculture et l’alimentation des hommesdans
le
monde
de
2050. Ce scénario est proche de la vision
de la FAO - 2010, et du scénario Agrimonde GO (INRA – CIRAD
2009).
Dans ce
scénario la prévision démographiquede 9 milliards d’habitants à l’horizon 2050
n’est pas remise
en cause. Nous avons retenu, au niveau mondial, les tendances
suivantes :
·Priorité est
donnée au développement
économique et à la croissance
·Priorité est
donnée à la poursuite de l’augmentation
de la production agricole à l’unité de surface, ce qui
permet de limiter
l’extension des surfaces nouvelles à mettre en culture .
·La limitation de
l’extension des surfaces
cultivées permet de consacrer d’autres surfaces cultivables
potentielles à une
production agricole à utilisation bioénergétique
et à favoriser le maintient
d’espaces naturels comme sources de biodiversité.
·L’augmentation de
la consommation de viande
dans les pays en développement nous apparaît comme
inéluctable. De grands pays
comme la Chine y sont déjà fortement engagés.
L’intensité du phénomène dépendra
de l’évolution culturelle d’autres pays très
peuplés comme l’Inde.
L’augmentation des besoins alimentaires sera important.
·La prise en compte
de contraintes
environnementales exigées par la société trouvera
ses solutions à travers un
fort contenu technologique et une mise en œuvre sur le terrain
économiquement
profitable.
De cette analyse
bibliographique il ressort, contrairement à ce que nous
étions en droit de penser au démarrage de cette
étude, qu’il n’y a pas de
problèmes majeurs pour nourrir potentiellement le monde d’ici
2050 :
·Que ce soit par la
poursuite de
l’augmentation mondiale des rendements.
·Que ce soit par la
prise en compte de
surfaces nouvelles qui peuvent être utilisées comme
variable d’ajustement.
Nous sommes
cependant conscients qu’une vision macroéconomique, simpliste
mais réaliste, comme celle-ci a ses limites :
·La poursuite de
l’augmentation des rendements
ne pourra se faire qu’avec un investissement important d’ordre
scientifique et
technologique.
·De même
« produire plus avec
moins » (l’intensification durable), n’est envisageable
qu’en levant des
verrous technologiques (certains sont en cours comme celui de la
génétique).
·Enfin, la
possibilité de nourrir
potentiellement et globalement le monde d’ici 2050 n’exclut pas, loin
s’en
faut, des inadaptations ou des problèmes localisés,
sources d’instabilité ou de
conflits potentiels. Pour beaucoup de pays non encore
développés et notamment
en Afrique, des solutions politiques, sociales et économiques
doivent d’abord
être mises en œuvre par des gouvernements responsables.
NOURRIR LA PLANETE N’EST DONC PAS
POUR LA FRANCE UNE FIN EN SOI.
En tout état
de cause, il faudra rajouter aux 2 milliards de tonnes de
céréales
produites actuellement, 1 milliard de tonnes supplémentaires
d’ici 2050.
2.L’AGRO-INDUSTRIE,
UN SECTEUR EXCEDENTAIRE VITAL POUR L’ECONOMIE FRANCAISE
A une époque
où l’on
redécouvre que les grandes puissances agricoles de la
planète sont également de
grandes puissances politiques et que l’agriculture et l’alimentation
redeviennent des marqueurs de la puissanced’une
économie,
il
nous
faut examiner la situation de
l’agriculture et de la céréaliculture en France.
La céréaliculture
française, un secteur économique essentiel à
maintenir et à développer :
·Plus de 50% de la
production de céréales
françaises est exportée, en priorité vers les pays
tiers pour le blé et vers
l’UE pour le maïs. Cette situation permet aux
céréales françaises d’être un des
rares secteurs économique excédentaire (4.4 milliards
d’euros sur 11.5
milliards pour l’ensemble du secteur agroalimentaire) dans une balance
commerciale ayant enregistré un déficit commercial record
en 2011 (70 milliards
d’euros).
·Il est VITAL pour
l’économie française
de garder son rang de grande puissance agricole.C’est à cette seule condition que
la production agricole française
participera, s’il le faut à l’alimentation des régions et
des pays
déficitaires.
·Néanmoins de
fortes positions
concurrentielles se développent :
-De grandes
puissances
agricoles apparaissent : Chine, Inde et plus récemment le
Brésil avec de
fortes ambitions exportatrices.
-Plus près de
nous,
les pays
de la Mer Noire (Russie, Ukraine
et
Kazakhstan) visent à terme 25 % des exportations mondiales de
blé contre 10 %
aujourd’hui.
Dans ce cadre la
céréaliculture française présente
néanmoins des atouts
indéniables :
-une
régularité de la
production supérieure aux grands pays producteurs (climat
tempéré et sols
favorables à la production)
-un savoir faire de
haut niveau
-une production aux
portes de l’Afrique, région la plus nécessiteuse
3.MAIS… LES
PERFORMANCES DE LA CEREALICULTURE FRANCAISE DECLINENT
Nos capacités d’augmentation de
la production sont remises en
cause :
-perte de surfaces
cultivables à haute valeur agronomique (plus de 80.000 ha/an, le
rythme le plus
élevé des pays européens)
-Erosion de la
compétitivité de notre
agriculture face à l’émergence des nouveaux
exportateurs potentiels
-Mais surtout une faible
progression, voire une stagnation des rendements
céréaliers en France alors que
partout ailleurs ils continuent leur progression. Ainsi, les rendements
moyens
en blé stagnent depuis une quinzaine d’années et les
rendements du maïs
continuent à progresser mais plus lentement (alors qu’aux USA,
à même niveau de
productivité, il n’apparaît aucun ralentissement).
La stagnation des
rendements en blé français mérite
une analyse fine et objective :
L’étude CLIMATOR (2010) donne des
pistes intéressantes mais
devrait faire l’objet d’une analyse critique et d’études
complémentaires.
CLIMATOR est un projet de recherche
pluridisciplinaire destiné à étudier
les impacts potentiels du changement climatique sur les
systèmes de culture
français. L’étude a été pilotée par
l’INRA auquel ont été associés 7 instituts
représentant les principales productions végétales
françaises.
Cette étude montre que :
1/ certaines espèces comme la
Betterave réagissent favorablement au réchauffement
climatique, alors que
d’autres comme le blé réagissent défavorablement.
2/ Pour le blé, une analyse
complémentaire (A. Gallais, GIS Moulon) montre sur la
période 1995 – 2010 que
la stagnation des rendements résulte de la combinaison d’un
certain nombre de
facteurs :
·Progrès
génétique
:
+
1q / ha / an
·Milieu et
techniques culturales : - 0.3q / ha / an
·Climat : -
0.7q / ha / an
Il
est étonnant de voir une part du progrès
génétique aussi
important, d’autant plus que pendant toute cette période
l’inscription au
catalogue a favorisé les Blé Panifiables
Supérieurs en général plus précoces et
présentant un potentiel de rendement plus faible.
En ce qui concerne
les aspects milieu et techniques, la diminution de l’effet
« intrants »
nous semble sous estimée, que ce
soit quantitativement ou qualitativement, notamment dans le cas des
fongicides
(aspect résistance et renouvellement plus lent des nouvelles
molécules).
Dans ces conditions
l’effet climat nous paraît avoir été sensiblement
surestimé.
4.CONCLUSIONS
·Il est d’abord VITAL pour
l’économie française de
maintenir un puissant secteur agroalimentaire, dont les
céréales, pour
rééquilibrer notre balance commerciale dont le
déficit ne cesse d’augmenter
·Le maintient de la France comme
une grande puissance agricole mondiale est la condition
indispensable pour lui permettre de participer, autant
que de besoin, à la sécurité
alimentaire
de la planète.
·Il nous paraît important
d’analyser précisément les causes multifactorielles de la
régression des
augmentations de rendement du maïs et surtout du blé. Il apparait encore plus stratégique
pour la filière de mettre en œuvre toutes les avancées
technologiques en cours et à venir, aujourd'hui
malheureusement
bloquées par une règlementation peu adaptée aux
enjeux technico-économiques de ces prochaines années.